Écoutez, c’est rare : depuis quelques jours le peuple parle. D’habitude, on ne l’entend pas, au mieux, on parle en son nom. Médias, experts, élus parlent leur propre langue, châtiée, correcte, formatée, avec les liaisons là où il faut et jamais de gros mots. C’est la langue dominante, c’est-à-dire la langue de ceux qui dominent. Le peuple écoute, le peuple regarde, mais le peuple n’a pas la parole. Ou alors il grogne. Comme les cochons, le peuple grogne, médias, élus, experts le répètent, le peuple, ça grogne.
Que vont devenir ces grogneurs de Gilets jaunes ? On s’interroge, mais c’est déjà une victoire, le peuple a pris la parole. Écoutez, ça ne durera pas. Les médias veulent des bons clients et le pouvoir veut des interlocuteurs manipulables. Depuis longtemps, dans nos reportages, ici comme dans le vaste monde, nous faisons entendre la parole populaire, mais rarement nous avons pu entendre et pu faire entendre de telles paroles, sincères, profondes, urgentes.
Le sociologue Patrick Champagne, collègue de Pierre Bourdieu, parlait ainsi de la parole des dominés : « ils sont parlés plus qu’ils ne parlent, et lorsqu’ils parlent aux dominants, ils tendent à avoir un discours d’emprunt, celui que les dominants tiennent à leur propos [1] ». Alors quoi ? Vox populi, vox Dei ? La voix du peuple, c’est la voix de Dieu ? Non, bien sûr, c’est pas que du génie, parfois aussi ça vous embobine.
Mais écoutez un peu le langage de Macron et le langage des « gens » dans nos reportages. Il y a un langage que vous entendez du matin au soir, partout, en boucle, jusqu’à la nausée, et un autre langage qu’on n’entend presque jamais, celui de la majorité des « gens » de ce pays. Sans plan de com’, sans mot d’ordre, sans éléments de langage, sans répéter la parole d’un leader ou d’un penseur Youtubeur, un instant, le peuple a pris la Bastille de la parole !
Programmation musicale :
– MOMO Ft. Charley Dornel : Ramène La France À La Raison
Une vidéo de l’opération péage-gratuit au Buchelay partagée par Anasse Kazib (Sud Rail) :
La fachosphère à l’oeuvre ! pic.twitter.com/dCNHwTubAh
— Anasse Kazib (@AnasseKazib) 25 novembre 2018