Premier volet du reportage de Gaylord Van Wymeersch

Brésil : la dictature néolibérale est possible (1/2) Abonnés

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Des Brésiliens manifestent contre la mort d’un soldat dans une attaque à main armée

Premier volet du reportage de Gaylord Van Wymeersch.

Dimanche 28 octobre, 150 millions de Brésiliens sont appelés aux urnes pour élire leur nouveau président. Qui de Fernando Haddad, candidat du Parti des travailleurs, ou de Jair Bolsonaro, le candidat d’extrême droite, obtiendra la majorité des suffrages ?

Fernando Haddad est le remplaçant de dernière minute de Lula. L’ancien président Luiz Inácio Lula da Silva a été condamné à douze ans de rétention pour corruption, emprisonné, déclaré inéligible et donc empêché de se présenter pour le Parti des Travailleurs. Haddad a pour lui le bilan de la politique sociale en faveur de la réduction des inégalités mené durant treize ans de « lulisme » dans le pays.

Jair Bolsonaro, lui, est arrivé largement en tête au premier tour avec 46,06 % des voies pour le PSL (Parti Social Libéral). Bolsonaro a fait campagne sur l’anti-corruption – il se targue d’être le seul candidat à ne pas avoir été pris dans le pot de confiture – pour un Brésil fort, sécuritaire, lavé de sa criminalité, et de ses péchés !

Mais savez-vous que Jair Bolsonaro est aussi l’homme choisi par les marchés financiers ?

Le 8 octobre, le Wall Street Journal – le quotidien financier le plus vendu dans le monde – a apporté son soutien à Bolsonaro dans son éditorial : « après des années de corruption et de récession, des millions de Brésiliens semblent penser qu’un outsider est exactement ce dont le pays a besoin. Peut-être qu’ils en savent plus que les réprobations internationales. [1] »

Des mauvais esprits ont rappelé que l’appétence du Wall Street Journal pour les dictatures n’était pas nouvelle. En 1980, le journal titrait : « les Chiliens votent l’extension du pouvoir de Pinochet, assurant la continuation de la libre entreprise ». Et à la mort de Pinochet en 2006, le quotidien rendait un vibrant hommage au dictateur chilien : « il a pris le pouvoir lors d’un coup d’État en 1973, mais il a finalement créé un environnement propice aux institutions démocratiques […] Il est responsable des morts et des tortures qui ont eu lieu sous son égide, mais si Salvador Allende avait réussi à transformer le Chili en un autre Cuba, beaucoup plus auraient pu mourir. [2] »

Quand le néo-libéralisme adoube un fasciste, ça donne aujourd’hui Bolsonaro.

Gaylord Van Wymeersch et Jonathan Duong

(illustration : Gontran Guanaes Netto)

Merci à Pedro Guanaes et Susana Bleil pour la traduction.

Merci à Rebeca du comité Lula Livre, merci au Collectif Alerte France Brésil, à Autres Brésils, ainsi qu’à João, Marilisa, Rosangela, Maria-José et Aline Piva.

Merci aussi à Dominique, Jean-Jacques Kourliandsky, Maud Chirio et Christophe Ventura.

Programmation musicale :
 Nara Leão : Opinião
 Milton Nascimento : Menino

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La sociologue publie « Les riches contre la planète. Violence oligarchique et chaos climatique ». Entretien Monique Pinçon-Charlot : « Dans tous les domaines de l’activité économique et sociale, les capitalistes ont toujours, toujours, toujours des longueurs d’avance sur nous » AbonnésVoir

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Les riches détruisent la planète, comme l’écrivait le journaliste Hervé Kempf. On le sait. Ils le savent. Ils le savent même depuis bien longtemps ! Le nouveau livre de Monique Pinçon-Charlot risque de ne pas plaire à tout le monde. Dans Les riches contre la planète, elle raconte comment une poignée de milliardaires est en train d’accumuler des profits pharaoniques en détruisant la nature, les animaux, les êtres humains et finalement toute la planète, menacée par les émissions de gaz à effet de serre.

Mais surtout, la sociologue analyse comment l’oligarchie, qui a toujours eu une longueur d’avance, organise, encadre et finance sa propre critique et ses contestataires. Histoire que l’écologie ne soit pas un frein au business, mais au contraire l’opportunité de développer de nouveaux marchés selon une « stratégie du choc » décrite par la canadienne Naomi Klein. Le capitalisme fossile est mort ? Vive le capitalisme vert !

Alors que faire ? Arrêter de parler d’« anthropocène », ce n’est pas l’humanité tout entière qui est responsable du dérèglement climatique, mais de « capitalocène », la prédation du vivant étant consciemment exercée par quelques capitalistes des pays les plus riches. Ensuite comprendre ce que masquent les expressions « transition écologique  », « neutralité carbone » ou encore « développement durable » forgées par le capitalisme vert. Et surtout lire d’urgence le livre de Monique Pinçon-Charlot pour prendre conscience que les mécanismes de la domination oligarchique s’immiscent partout, y compris là où on ne les attendait pas…

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« Par milliers, les Algériennes et les Algériens furent humiliés, spoliés, déplacés, enfumés, massacrés, décapités... » Il faut connaître cette époque pour comprendre la suite de la colonisation et son dénouement tragique. Dénouement que certains n’acceptent pas et qui le ravivent comme une amputation. Pourtant recherches, témoignages et reportages au cours des dernières années semblaient avoir apporté les moyens d’un apaisement des mémoires. Mais une extrême droite revancharde et négationiste, dotée de forts moyens médiatiques, gagne du terrain. Face à la concurrence des rentes mémorielles, il est donc nécessaire de mieux connaître cette sombre sanglante histoire. Aussi ROSA MOUSSAOUI interroge ALAIN RUSCIO, un des meilleurs historiens du fait colonial qui publie une somme passionnante à La Découverte.

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Depuis longtemps on se répète : « on sait pas ce qu’on veut, mais on sait ce qu’on veut pas ». Si Lordon reprend la formule, c’est tout d’abord pour dire que ce qu’on ne veut pas, c’est le capitalisme. Nous n’avons plus le choix, c’est lui ou nous, il n’y a plus d’arrangement possible. Comme dit un AMG, « repeindre le capitalisme en noir ne suffit plus ». Oui, c’est vrai, déplorer, dénoncer, condamner, s’indigner à longueur d’année nous conduit à l’impuissance et à la résignation, c’est-à-dire là où nous sommes aujourd’hui.