LES DICTIONNAIRES EN DEUIL, ROBERT PLEURE ALAIN (hommage)

ALAIN REY : QUEL FUT SON DERNIER MOT ?

Le

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Alain Rey en 2014 (photo : Lionel Allorge)

Le plus populaire des grands érudits, le plus expressif des vocabulistes mais surtout, au-delà de son colossal travail pour Le Robert et autres dictionnaires en tous genres, Alain Rey a fait comprendre toute l’importance des mots et du langage, l’inventivité intarissable des humains, les hasards des sonorités des bouches et des corps, et d’abord comment les mots ensorcellent, comment les mots sont des cages et les armes les plus puissantes des puissants.

Avec son air bonhomme, Alain Rey, chaque jour, vendait la mèche, chaque jour le grand public comprenait « ce que parler veut dire ». Il rappelait que les mots sont un bien commun, une invention inconsciente permanente sans limite et non la propriété des sachants confits de suffisance. La formidable popularité de sa chronique matinale sur France inter a fini par agacer le pouvoir. Fin juin 2006, il fut viré par une nouvelle direction chargée de faire le ménage au seuil d’une année électorale. Sur un claquement de doigts, des millions d’auditeurs étaient privés d’un génial (et modeste) éducateur. Comme il se doit, Alain Rey ne mâchait pas ses mots : « la pensée UMP est dominante, fallait que France Inter soit propre sur elle [1] ».

Or, au même moment, et pour les mêmes raisons, LÀ-BAS allait être déprogrammé de 17 heures à 15 heures, ce qui nous faisait perdre les deux tiers de notre audience. Notre malheur était que nous avions une excellente écoute. Rédaction et direction nous reprochaient nos émissions pour le NON au référendum européen l’année précédente. Pas question de se laisser faire. Avec toute l’équipe, nous avons lancé sur le net une pétition qui a eu un énorme succès. 200 000 signatures en trois semaines. Et surtout, en quelques jours, nous avons organisé un meeting au gymnase Japy. Un tabac ! 1 500 personnes, orchestre, chanson, la Confédération paysanne pour nourrir et abreuver tout le monde, et à la tribune Serge Halimi, Florence Aubenas, Louis Bozon, François Ruffin, Annick Coupé et… Alain Rey !

Voici, en hommage, des extraits de cette soirée mémorable avec, enfin, une définition de l’expression « là-bas si j’y suis ».

Précisons que nous sommes passés malgré tout à quinze heures en septembre 2006, mais nous avons rapidement augmenté l’audience jusqu’à dépasser l’horaire précédent. Alain Rey a poursuivi son magnifique parcours. Une question se pose, quel a été son dernier mot ? Quelqu’un le sait-il ? Sinon, selon vous, quel a pu être son dernier mot ?

D.M.
[RADIO] Où va France Inter ? [30 juin 2006]

L'équipe de Là-bas attend vos messages dans les commentaires et sur le répondeur au 01 85 08 37 37 !

Notes

[1Judith Perrignon, « Enjeux de mots », Libération, 26 septembre 2006.

Voir aussi

Alain Rey slame avec le youtubeur Squeezie

Alain Rey n’était pas une référence que pour l’auditeur de France inter. Sur YouTube aussi, on connaissait son érudition et son humour. En 2017, il est invité par le vidéaste Squeezie, avec les rappeurs Bigflo et Oli, à s’essayer à l’exercice du slam. Alain Rey devient instantanément une légende d’Internet : « j’veux pas mourir d’inanition, d’inanition, mais j’veux chiller, chiller avec mes kheys ! » La vidéo culmine à plus de 10 millions de vues :

Après quoi, Alain Rey lance un défi au jeune youtubeur et au duo de rappeurs : composer un rap autour de quinze mots inattendus comme « épissoir » ou « épectase ». Le défi est relevé et le « freestyle du dico » affiche plus de 40 millions de vues :

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