Après des semaines de mobilisations parfaitement encadrées, avec des manifs énormes jusque dans les moindres bourgades, avec des grèves plutôt bien comprises et même soutenues par un pays unanimement opposé à un allongement de l’âge de départ à la retraite, rien n’a été obtenu, au contraire, le pouvoir a imposé son projet par décret au mépris de tout débat, ce qui a provoqué la violence dans les manifs, mais seulement à partir de là. C’est nettement le mépris du pouvoir qui a déclenché ces « débordements » qui sont, pour ce pouvoir, le moyen classique d’enclencher le pourrissement du conflit et le discrédit de la contestation. Sauf que la mobilisation ne fléchit pas, le pouvoir est toujours aussi impopulaire et au contraire, devant la violence, il propose des négociations. Le rapport de force est engagé.
Les mots comme « lutte » et « combat » sont devenus des euphémismes symboliques, mais les affrontements actuels font le lien avec toutes les violences et toutes les guerres sociales d’où sont nées parfois des progrès et parfois des monstres.
Dans la manif, il y a les gentils manifestants et il y a les méchants manifestants. Le pouvoir et les vrais grands médias ne cessent de vous le répéter. Il y a le brave peuple naïf et sincère (en jaune), mais hélas il y aussi ces casseurs, ces « black blocs » (en noir).
Mais qui sont ces bêtes noires ? Des idiots utiles ou des alliés efficaces ? Professeur de science politique à l’université de Montréal, Francis Dupuis-Déri, chercheur engagé, les connaît depuis longtemps de l’intérieur. La violence de la rue a montré la violence mille fois plus violente de l’arrogance des riches, du chômage, de la précarité, des inégalités et de la destruction des ressources humaines et naturelles.
Depuis longtemps, Francis Dupuis-Déri regarde le monde à travers le prisme de l’anarchie. Soit l’ordre moins le pouvoir. L’anarchie a une histoire multiple et têtue. Une manière de voir et de faire qui peut inspirer les temps qui courent devant l’histoire qui nous mord la nuque.