Le 24 février s’est ouvert à Londres le procès en extradition de Julian Assange. Privé de liberté depuis 2010, le journaliste fondateur de WikiLeaks est « réclamé » par les États-Unis pour dix-huit chefs d’inculpation. Assange risque une peine de 175 ans de prison.
Julian Assange n’a pas eu le droit de prendre la parole pendant l’audience qui doit déterminer si la Grande-Bretagne peut l’extrader vers les États-Unis. La juge lui a rappelé à plusieurs reprises que seuls ses avocats avaient le droit de s’exprimer. Sauf que Julian Assange assistait à l’audience enfermé dans un box vitré : il s’est plaint de ne pouvoir entendre correctement les débats, ni de pouvoir s’entretenir de manière confidentielle avec ses avocats. Les débats ont été suspendus ce jeudi 27 février, et doivent reprendre en mai. Ses nouveaux avocats en France, Me Éric Dupond-Moretti et Me Antoine Vey, ont annoncé vouloir déposer une nouvelle demande d’asile en France.
Pour comprendre pourquoi Assange ne doit pas être extradé vers les États-Unis, retrouvez notre émission du 5 février 2020 avec Juan Branco, soutien et ancien avocat en France de Julian Assange.
Que s’est-il passé pour qu’un héros de la liberté devienne l’ennemi public numéro un ? En s’appuyant sur son expérience au sein de l’équipe juridique d’Assange, Juan Branco retrace le parcours incroyable du plus grand lanceur d’alerte de notre époque, « qui s’est peut-être brûlé les ailes, mais que nous pouvons encore sauver. »
En avril 2019, après 2 487 jours d’enfermement et de surveillance 24 heures sur 24 par la CIA, Julian Assange est exfiltré de l’ambassade de l’Équateur où il avait cru pouvoir se réfugier. Des hommes en noir le mènent à la prison antiterroriste de Belmarsh. Depuis, selon l’ONU, il est soumis à une torture incessante.
Que s’est-il passé en dix ans pour qu’un héros de la liberté – dont le travail a été repris et utilisé par les grands médias du monde entier – devienne l’ennemi public numéro un ? Qu’a commis Assange de si terrible pour qu’on accepte ainsi le renversement de son destin ?
Par contraste, Assange et WikiLeaks ont mis en lumière la connivence entre les médias et le pouvoir. Pas seulement avec le pouvoir des quelques milliardaires qui possèdent la grande majorité des médias, mais un lien de consanguinité qui unit les journalistes et leurs sources. Un lien évidemment apparent dans le journalisme de « connivence », mais qui est dissimulé dans le journalisme de « révélations ». Ce journalisme qui dénonce Cahuzac, Benalla ou François de Rugy avec ses homards ne remet pas en cause le système. Au contraire, en dénonçant la pomme pourrie, il sauve l’ensemble du panier. C’est là une fausse opposition agitant de fausses alternatives et pour qui, au fond, « un autre capitalisme est possible ».
Ce leurre, bien sûr, n’est pas nouveau. C’est à ce puissant fonds de commerce que Julian ASSANGE a été confronté. Dans un premier temps, le monde médiatique l’a porté au pinacle. Du New York Times au Monde, les plus grands titres ont largement exploité WikiLeaks. Jusqu’au moment où ils ont redouté que leur pouvoir ne s’effondre puisque n’importe qui pouvait avoir accès aux mêmes sources et pourrait bien un jour se passer de ces guides indispensables. C’est alors qu’Assange est devenu moins fréquentable et même plus fréquentable du tout.