Monsieur Mermet,
Je suis professeur de danse contemporaine. Je n’oserai dire chorégraphe, j’ai toujours eu peur de ne pas être à la hauteur d’un titre. Mais la pédagogie, c’est mon truc. J’aime transmettre.
Transmettre à travers la danse, des valeurs et ce en quoi je crois, et un peu de culture.
Je suis une amoureuse de musique, toutes les musiques, electro, classique, du monde, métissées, tant qu’elles ont de la profondeur, et des mots. A l’heure où la danse contemporaine s’est détachée de ses supports musicaux (musiques stridantes, silences...) et de tout sens, de tout propos, moi, je n’ai eu de cesse d’éprouver le besoin de danser les mots et de laisser les corps exprimer la puissance des rythmes, la volupté des voix, le mouvements des instrumentations.
Combien de fois, j’ai eu envie de danser ce que j’entendais à 15h. Toutes ces voix et leur authenticité, leurs rages, leurs peurs, leurs accents, leurs silences m’inspiraient.
Mais voilà, je ne suis qu’une "prof de danse" avec beaucoup d’illusions, qui ne sait pas compter, qu’on pourrait considérer comme un peu gaucho ? communiste ? En tout cas, je sais que l’Humain me touche plus que tout. Donc voilà, j’apporte des toutes petites pierres aux élèves qui me côtoient sans en dire trop.
Cette année, j’ai travaillé un an sur votre voix, une introduction d’une de vos émissions pour un concours. Vous pourrez voir ce que ça donne d’avoir une voix qui fait danser...Sur la vieillesse.
Un an auparavant, j’ai monté une autre pièce dont le premier support sonore m’est venu d’un extrait d’une de vos émissions, un entretien avec un travailleur à la chaîne et ses maux de corps. La danse ne rend rien en vidéo. Les émotions ne transparaissent pas, mais bon...Et celle que je viens de commencer sur le recrutement sort de nouveau de votre sélection musicale.
Dans les concours de danse contemporaine, mon travail plaît jusqu’au point où l’on me conseille de retirer le texte...Trop de narration ! Trop de sens ! Trop de sens à l’heure où les comédies musicales nous font étouffer sous des refrains de sentiments visqueux et grossiers. Il n’en est pas question ! Sans ces mots, sans leur sens, ma danse ne répond à rien. Alors je continue. Mais mon (petit) public (1000 personnes) aime, ça lui parle, ça le touche, ça l’émeut.
A l’heure, où ma source s’est éteinte, je me suis dit que vous et votre équipe aimeriez peut-être savoir qu’il y a des petits qui sont nés suite à vos créations sonores.
Je ne suis certainement pas à la hauteur de ce que vous êtes, de ce que vous représentez en matière de résistance mais je me lance.
Juste un grand merci.
Sarah
Ré-écouter "Les Vieux" 18 novembre 2009