— Le , par rougon.
Collectif « Pour Suzilène » (Colombes 92)
Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Ministre de l’Intérieur,
Monsieur le Ministre de l’Education Nationale,
Monsieur le Préfet des Hauts de Seine,
Monsieur le Recteur de l’Académie de Versailles,
Monsieur l’Inspecteur de l’Académie des Hauts-de-Seine,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs les Conseillers Régionaux,
Mesdames et Messieurs les Conseillers Généraux,
Madame le Maire de Colombes,
Colombes, le 17 Octobre 2006
Nous sommes enseignants ou personnel du Lycée Professionnel Valmy de Colombes (Hauts de Seine), fonctionnaires de l’Etat rattachés au Ministère de l’Education Nationale, donc au service de la France et avant toute autre chose à celui des élèves scolarisés (quelque soient leurs origines sociales, leur situation administrative, leur niveau scolaire, leurs opinions), de nos enfants, ceux de la République.
Jeudi 12 Octobre dernier, Suzilène MONTEIRO, âgée de 18 ans et demi, après 13 jours en centre de rétention, a été expulsée vers le Cap Vert, son pays d’origine. Le Ministère de l’Intérieur a affrété un avion parti de l’aéroport du Bourget pour cette jeune fille.
Etait-elle si dangereuse pour la Nation ?
Depuis un certain temps, on nous parle de « volonté d’intégration » ou encore, plus récemment « d’immigration positive »... Selon vous, Suzilène ne remplissait pas ces conditions pour rester parmi nous !
C’est oublier que cette jeune fille vient d’obtenir son Certificat d’Aptitude Professionnelle de Pressing. C’est peu de chose diront certains !
Rappelons qu’elle fait tout de même partie des 7% d’Etres Humains qui, sur cette planète, possèdent un « diplôme ». Pour une « simple Capverdienne qui ne mérite apparemment pas de vivre en France », cela constitue, à notre sens, une preuve on ne peut plus explicite de sa volonté d’intégration, de sa grande volonté d’être considérée dans la Société, d’être citoyenne, de vivre tout simplement... Précisons que malgré les diverses rumeurs, relayées par certains médias, Suzilène n’a, à ce jour, aucun problème avec la Justice française.
Le traumatisme généré par cette situation est difficilement imaginable lorsqu’on ne le vit pas directement. La détresse psychologique est profonde. Malgré tout, nos élèves se sont montrés, à l’annonce de l’arrestation puis de l’expulsion de Suzilène, dignes, responsables, exceptionnellement « adultes », citoyens mais aussi déçus et apeurés de ne pas avoir été entendus après deux semaines de mobilisation pour leur camarade.
Ils ont surtout peur qu’après Suzilène, vienne le tour d’un des leurs, ami, proche, parent, n’importe où et n’importe quand...
Combien de temps encore notre pays refusera-t-il à un Etre Humain la Liberté de vivre dignement et de circuler sur son sol ?
Dans la nuit de Jeudi à Vendredi, en arrivant au Cap Vert, déposée par les militaires et gendarmes français, Suzilène s’est retrouvée démunie avec pour tout soutien familial une grand-mère de 83 ans...
Pourquoi Suzilène ? Qu’a-t-elle fait pour ne pas mériter de vivre en France ? Qui sommes nous pour en décider ?
Suzilène ne serait-elle qu’un simple « pion », une simple marchandise au service d’intérêts politiques et électoraux ou d’une majorité « bien pensante » ?
Pour nous, il s’agit de l’existence et du bien être d’Hommes, de Femmes, d’Enfants et simplement de la place de l’Etre Humain dans notre Société.
On peut penser que le cas de cette jeune fille est « regrettable », qu’il s’agit « d’un cas parmi d’autres », ou encore que la France « ne peut accueillir toute la misère du Monde » et « qu’il y a tant de personnes à aider dans notre pays avant elle »...
Même solidaires de Suzilène, nous avons bien conscience que chacun est libre de son opinion et nous la respectons.
Sachez que notre démarche n’a qu’un but : la condition de Suzilène et de tous les enfants dans sa situation.
On ne peut accueillir toute la misère du Monde, mais on peut certainement œuvrer pour qu’elle aille un peu mieux et la France doit y prendre toute sa part.
Il ne s’agit pas ici de nier les Lois, pas plus que de politiser un mouvement ou encore de se servir du malheur de Suzilène à des fins personnelles ou vindicatives mais simplement de soulever une nouvelle fois le manque de logique et d’approche humaine dans cette situation.
En 1954, adaptant Boris Vian, Mouloudji s’adressait, à travers une chanson, à vos prédécesseurs en les nommant « Messieurs qu’on nomme Grands ». Alors, aujourd’hui, soyez dignes de leur héritage et sachez le rester !
Persuadés de votre attachement au Service Public et au bien-être de l’Humanité, nous vous demandons solennellement de faire revenir Suzilène en France et de régulariser ses camarades.
Monsieur le Président, restons le pays, quitte à être le dernier, de la Liberté et surtout des Droits de l’Homme.
Collectif « Pour Suzilène », Lycée Professionnel Valmy, Colombes (92).
Bakouma Christophe, Bernard Olivier, Berville Myriam, Cartier Mathilde, Chappé Véronique, Chauvet Michel, Chgour Abdellatif, Coulon Nelly, Danel Patrick, Da Silva Sonia, Di Giovanni Nelly, Domoraud Irma, Durand Franck, Esrhyer Abdel, Frager Françoise, Gatti Emma, Geminel Patrick, Huon Jérome, Kech Valérie, Ledent Dimitri, Maalem Katia, Mazari Boubakar, Nietge Valérie, Pagnoux Sophie, Ramdani Nawal, Reboux David, Signarbieux Régis, Siohan Diane, Titous Messaoud, Vasic Michel, Vilpellet Françoise, Vincq Agathe, Zakari Souad, Zekri Taha