Nommer l’innommable. Inceste et viol d’enfant : comment osait-on en parler il y a 20 ans ? Une émission du 4 mai 1999. PODCAST

Viols, inceste : « Si je me fous en l’air, je supprime le vrai problème »

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«  Inceste, le dire et l’entendre ». Dans ce documentaire diffusé le 26 septembre sur France 3, notre amie Corinne Masiero révèle ce dont elle fut victime parmi d’autres témoignages. Cette diffusion nous a remis en mémoire une émission très particulière d’il y a plus de vingt ans. Dans une longue lettre, un auditeur nous avait confié de terribles confidences. Durant des années, il avait été sexuellement abusé par son frère aîné. Malgré le temps, il restait hanté et pire encore, il redoutait de reproduire ces actes sur ses propres enfants. En outre, il savait que sa sœur, elle aussi, avait été abusée par le même frère aîné mais il n’en avait jamais parlé avec elle. Ce que voulait cet auditeur, c’est témoigner publiquement contre un tabou trop souvent enfoui dans les nœuds pourrissants des secrets de famille.

Nous avons longuement hésité. Aborder un tel sujet il y a vingt ans nous exposait à des critiques en voyeurisme et en déballage populiste. Pour la bourgeoisie culturelle de l’époque, ces sujets relevaient des émissions racoleuses de Mireille Dumas ou de Jean-Luc Delarue. Pour les progressistes éclairés, ces affaires de mœurs regardaient la justice et la psychiatrie. Pour les élites toujours avides de choses transgressives, l’écrivain violeur de collégiennes et d’enfants philippins était un rebelle qu’on aimait avoir à sa table. Mais notre auditeur n’était pas de ce monde-là. Il ne préparait pas un livre événement.

Au téléphone, il confirmait sa démarche, on ne peut oublier que ce qui existe et n’existe que ce qui est nommé. Comment faire avec la douleur ? Mettre des mots dessus. Ce fragile argument nous a décidés. Notre auditeur souhaitait parler de tout cela avec sa sœur, avec laquelle, donc, il ne s’était jamais confié. Elle avait accepté et elle avait donné son accord pour que la conversation fut enregistrée comme son frère le souhaitait. C’est notre journaliste, Thierry Scharf, qui fut chargé du reportage et Bruno Carpentier qui a assuré la belle réalisation de l’émission.

La voici, 22 ans plus tard, sans la moindre retouche :

[RADIO] Viols, inceste : « Si je me fous en l’air, je supprime le vrai problème » [4 mai 1999]
La publication du livre de Camille Kouchner, qui révèle les abus sexuels d’un important personnage sur son beau-fils mineur, nous a remis en mémoire une émission très particulière d’il y a plus de vingt ans : un reportage de Thierry Scharf du 4 mai 1999.
reporter : Thierry Scharf
journaliste (et dessin) : Daniel Mermet
réalisation : Bruno Carpentier

LES MESSAGES DU LENDEMAIN

Nous avons reçu beaucoup de messages à la suite de cette diffusion. Aucun ne critiquait notre démarche, au contraire, nous avons reçu beaucoup d’autres témoignages qui révélaient cet énorme tabou et toutes ces souffrances enfouies et dédaignées.

[RADIO] Les messages du lendemain [5 mai 1999]

ATTENTION, FRAGILE

Un homme se cogne la tête contre les murs de son for intérieur.
Il appelle, il s’écroule, il s’enfouit, il cache, il tâche, il se shoote, il se flingue, il tente de s’étouffer avec un oreiller, il joue l’amnésique qui lui permet de se protéger contre l’horreur de la vérité.
De sa vérité.
Mais oublier sa vérité, c’est oublier son identité.
Il implore l’oubli, mais on ne peut oublier que ce que l’on sait, que ce que l’on connaît.
On ne peut oublier que ce que l’on nomme.
On ne peut oublier que ce qui existe, et n’existe que ce qui est nommé.

Comment faire avec la douleur ? demandait l’autre.
Mettre des mots dessus.
D’abord à tâtons, et c’est long.
Et ça remue, et parfois ça remonte du fond, du fin fond.
Il faut trouver des oreilles humaines.

Il nous a écrit, cet auditeur, une longue lettre, où il dit entre autres :
« Ça n’arrive pas qu’aux filles, le viol, d’ailleurs, elles non plus ne sont pas crues.
Le plus dur, c’est la solitude, je ne peux plus me taire. »
Pourquoi s’adresser à nous ?
Pourquoi devrions-nous écouter Pascal ?
Dix enfants sur cent sont victimes d’abus sexuels.
Et dans le monde entier ?

Viol, inceste, secrets de famille.
Notre société est très lente à sortir de son sommeil criminel.
Ce que les psychiatres appellent « l’ogre intérieur ».
Qu’on pourrait appeler aussi le cochon qui sommeille.
C’est cette violence, cette pulsion originelle qui est la force de la vie, mais qui parfois se retourne en force de mort et de destructions.
Ce qui vaut pour un peuple, pour toute une nation, vaut pour un individu,
Et c’est le même crime contre l’humanité.

Ce que peut le silence.
Ce que peut le mensonge.
Ce que peut le manque d’écoute.
Ce que peut le manque d’amour.
Attention, fragile.
Très.

Daniel Mermet (1999)

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    C’était le grand oral de Michel Barnier ce mardi à l’Assemblée nationale. Dans un contexte de déficit public historique, notre premier ministre a cité le général de Gaulle : faire beaucoup avec peu et en partant de presque rien. Il aurait tout aussi bien pu citer Churchill et son fameux « du sang, du labeur, des larmes et de la sueur » car le gouvernement Barnier a déclaré la guerre au déficit. Sauf que, avant de partir en guerre, le nouveau chef de Matignon serait bien avisé d’ouvrir ses tiroirs. Dans l’un d’eux, il trouverait un rapport pondu en 2016 par de pertinents fonctionnaires (qui coûtent moins cher que les consultants de McKinsey !). Et ces fonctionnaires ont eu une idée lumineuse : la lutte contre le racisme et les discriminations est une mine d’or ! Vu l’état des finances publiques, ça étonne Dillah que le gouvernement ne saute pas sur l’occasion…

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    Le colonisateur peut gagner des batailles mais il perd toujours la guerre. De l’Algérie à l’Irlande, du Vietnam au Mozambique, partout le colonisateur a fini par perdre. Même les autochtones anéantis dans les Amériques reprennent peu à peu leur place dans l’histoire. Le sionisme est né au temps du colonialisme triomphant au XIXe siècle avec l’idée de créer un État comme refuge pour le peuple juif persécuté. Mais où ? Le lieu, comme le projet, étaient très loin de faire l’unanimité dans le monde juif où le sionisme a connu beaucoup d’adversaires. Le débat a persisté et se ranime aujourd’hui dans le monde au moment où Israël s’enfonce dans l’impasse sans issue d’une violence sans borne. Dans un livre court, les deux universitaires spécialistes de l’histoire du judaïsme, Esther Benbassa et Jean-Christophe Attias, familiers d’Israël et soutiens de la cause palestinienne depuis toujours font part de leur questionnement.

  • Le géographe Pascal Clerc publie « Émanciper ou contrôler ? Les élèves et l’école au XXIe siècle » aux éditions Autrement « Pourquoi est-ce qu’on n’apprend pas à réparer les vélos à l’école ? » Abonnés

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    Qu’est-ce qu’un géographe ? Un chercheur qui étudie les paysages, l’organisation des espaces et la façon dont les humains arpentent ces espaces. Appliquer sa méthodologie à l’école, c’est ce qu’a fait le géographe Pascal Clerc qui publie Émanciper ou contrôler ? Les élèves et l’école au XXIe siècle aux éditions Autrement. La sociologie nous enseigne que les « formes informent », mais également que les « formes forment ». Alors nos écoles de la République ressemblent-elles à des monastères ou à des prisons ? Comment les a-t-on dessinées et construites ? Ces lieux où nos enfants passent toutes leurs journées sont-ils des lieux d’émancipation ou des lieux de contrôle et de discipline des corps et des esprits ? Puisque les espaces définissent le type d’apprentissage qu’on y fait, on devrait concevoir les écoles en fonction des objectifs pédagogiques. « Pourquoi est-ce qu’on n’apprend pas à réparer les vélos à l’école ? » Éléments de réponse avec le géographe Pascal Clerc, qui est l’invité de Laurence De Cock dans ce nouveau numéro de « Si j’aurais su ».

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Tout un été Là-bas La vérité, un concept étranger à Raphaël Enthoven AbonnésVoir

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Dimanche 12 mai, le très médiatique Raphaël Enthoven était invité de Benjamin Duhamel dans son émission « C’est pas tous les jours dimanche » sur BFMTV. L’occasion pour le talentueux orateur d’asséner une de ces belles sentences dont lui seul a le secret : « nous périssons de la criminalisation de l’opinion d’en face ». Criminaliser l’opinion d’en face, c’est pourtant exactement ce que le philosophe a fait pendant toute l’émission, en repeignant systématiquement en odieux antisémite toute personne qui critiquerait les bombardements israéliens sur Gaza. Et ce grâce à une série d’approximations, de contre-vérités et de mensonges dont le nombre et l’ampleur – en seulement vingt-sept minutes d’entretien – forcent le respect. Extraits.

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La Bible dit que ce qui ne s’obtient « ni par la puissance, ni par la force » s’obtient par l’« esprit ». Or aujourd’hui en Israël, un dicton populaire a transformé ce message, c’est devenu : « ce qui ne s’obtient pas par la force s’obtient avec plus de force ». Comment en est-on arrivé là ? Comment une extrême droite raciste et suprémaciste est-elle arrivée au pouvoir ? Un gouvernement soutenu par toutes les extrêmes droites du monde, y compris les plus antisémites ?

Tout un été Là-bas Alain Gresh : « Palestine, un peuple qui ne veut pas mourir » AbonnésÉcouter

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Ben oui, mais c’est la guerre, que voulez-vous… Rarement un conflit aura été accompagné par tant de mauvaise foi, par tant de mensonges, de désinformation, d’affabulation. Rarement le manichéisme n’aura autant dominé et fait oublier la profondeur historique d’une crise que nous redécouvrons à chaque conflit. Rarement la politique française n’aura été aussi lâche, se contentant d’un suivisme affligeant à l’égard du gouvernement israélien et de son parrain américain.

Tout un été Là-bas : réécoutez ce grand entretien, trois jours après le 7 octobre 2023, avec l’ex-ambassadrice de Palestine LEÏLA SHAHID : APRÈS LA TERREUR, LA TERREUR Accès libreÉcouter

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« Il ne peut y avoir aucune explication », disait le premier ministre socialiste Manuel Valls, « car expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser. » Malgré cette forte pensée, nous vous proposons cet entretien à chaud avec Leïla Shahid, ex-ambassadrice de la Palestine, témoin et actrice engagée en première ligne et toujours militante de la cause palestinienne. Sommée de dénoncer le terrorisme islamiste, elle répond : « toute action contre des civils, qu’elle soit une action palestinienne, israélienne ou française, est un crime contre l’humanité ».