« Misérables égoutiers ! » C’est comme ça que l’avocat Richard Malka qualifie ceux qui ont publié les photos de son client Benjamin Griveaux [1]. Une insulte pour les égoutiers, au moment même où ils se battent contre la réforme des retraites qui va repousser l’âge du départ, alors que les risques et la pénibilité de leur métier sont depuis longtemps reconnus. Un reportage avec les égoutiers en lutte contre ce mépris révoltant.
Cette délicate comparaison a beaucoup choqué les égoutiers. Et nous aussi : rarement le mépris de classe s’est montré aussi franchement, sans retenue.
Les égoutiers, ou « agents d’assainissement », sont 4 700 en France, dont 2 000 dans la fonction publique. Ils ont pour mission d’assurer le bon écoulement de l’eau dans les égouts, qu’ils nettoient le plus souvent à la pelle et au seau, dans une odeur pestilentielle, au milieu des cafards, des rats et des bactéries. Selon une étude de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, la surmortalité est importante chez les égoutiers, à cause des gaz mortels, des produits chimiques, et des déchets radioactifs qu’ils respirent.
Du fait de cette insalubrité, les égoutiers du secteur public ont obtenu de partir à la retraite à partir de 52 ans, c’est-à-dire dix ans avant l’âge minimum, à condition qu’ils aient travaillé au moins vingt ans dans les égouts.
Depuis début décembre, ils se battent pour garder leur système de retraite
Avec la réforme des retraites, ils vont devoir travailler 8 ans ou 10 ans de plus ! Un amendement précise que les égoutiers recrutés avant le 1er janvier 2022 pourront partir à la retraite à 52 ans. Mais avec une retraite de quel montant ? Sous quelles conditions ? Et à l’avenir, qui acceptera de faire ce métier s’il n’y a plus de contreparties, si les égoutiers sont condamnés à mourir au travail ?
Les égoutiers travaillent de 6h30 à 13h, dont 4 heures dans les égouts, les pieds dans la merde. Nous espérons qu’au moins, après avoir regardé notre reportage avec les égoutiers du Val-de-Marne, Emmanuel Macron y pensera à chaque fois qu’il tirera la chasse.