Mayotte et Comores : le premier cimetière marin du monde. Reportage : Daniel Mermet et Giv Anquetil (2006)

MAYOTTE, DARMANIN, DARD MALIN…

Le

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De la poigne, du muscle, du bâton, il se démène, Gérald Moussa Darmanin, en ce mois d’août, il est partout, comme Sarkozy son modèle, il veut nous montrer qu’il en a. Pas comme cette Marine Le Pen, que de la mollesse celle-là, il lui avait dit en face, on s’en souvient. Mais tous deux sont bien d’accord pour aller pêcher dans les eaux xénophobes, avec les mêmes appâts et les mêmes hameçons. Le droit du sol, par exemple, un droit lié de longue date à l’histoire du pays, d’Eric Ciotti à Eric Zemmour, l’extrême droite milite pour son abolition. Marine le Pen verrait même d’en passer par un référendum. La remise en cause de ce droit fondamental, c’est aussi le but de ce voyage de Darmanin à Mayotte. Nous ne voulons pas être envahi par les crève-la-faim, allez faire ça ailleurs

C’est le sens de ce que le ministre de l’Intérieur vient de proclamer à Mayotte en lançant la lutte contre « l’attractivité sociale », c’est-à-dire empêcher les migrants des Comores de fuir la misère à bord des fameux kwassa-kwassa, dans l’espoir de survivre à Mayotte. Cette traversée fait des centaines de morts chaque année, c’est le premier cimetière marin du monde, un record français.

Un kwassa-kwassa est intercepté par la gendarmerie au large de Mayotte (photo : France télévisions)

Cette situation misérable dure depuis des années. En 2006, nous avons proposé une série de reportages, « MAYOTTE, UN CONFETTI EXPLOSIF ». Un titre qui indique que la situation qui indigne soudain Monsieur Darmanin n’est pas franchement nouvelle. Nous étions notamment à Anjouan, une des îles des Comores, avec ceux qui s’embarquent pour Mayotte au péril de leur vie. Depuis, la situation s’est encore dégradée. Prenez le temps d’écouter ce reportage en vous mettant un instant à la place « DU » Comorien.

[RADIO] Mayotte, un confetti explosif [janvier 2006]
Mayotte et Comores : le premier cimetière marin du monde. Reportage : Daniel Mermet et Giv Anquetil (2006)
Là-bas si j’y suis

MAYOTTE et les COMORES

Même avec ses émeutes et les violences, Mayotte n’intéresse pas grand monde, à part le Rassemblement national qui arrive largement en tête (59 % pour Marine Le Pen au second tour de la dernière présidentielle). Depuis des années, le pourrissement de Mayotte et des Comores est pourtant la conséquence de la colonisation française au XIXe siècle.

Alexandre Meunier, « carte des îles Comores » (détail), ministère des Colonies, 1903

À l’entrée du canal du Mozambique, l’archipel des Comores est constitué de quatre îles, avec une histoire et une langue commune. Lors du référendum de 1974, Mayotte a voulu rester dans le giron de la France, alors que les trois autres îles des Comores choisissaient l’indépendance : Anjouan, Mohéli et la Grande Comore. La France, qui tenait absolument à garder un pion stratégique dans cette région, a conservé son emprise sur cette île alors même que le vote concernait la totalité de l’archipel. Ce coup de force politique, dénoncé par l’ONU, a imposé une rupture et un clivage qui a entraîné des années de souffrances et de violences. Néanmoins, de même langue et de même culture, les Comoriens pouvaient encore circuler, entrer et sortir de Mayotte, jusqu’à l’imposition d’un visa en 1995, le « visa Balladur », qui a entraîné la situation monstrueuse d’aujourd’hui. Le visa Balladur fut surnommé le « visa de la mort ».

Les Comores comptent parmi les pays les plus pauvres au monde, classé 170e sur 186 pays par le programme des Nations unies pour le développement. Nombre de Comoriens se sont exilés en France, d’où ils soutiennent maigrement leurs familles restées au pays. Ceux qui parviennent à vivre à Mayotte sont souvent exploités et entassés dans des bidonvilles misérables, ces réfugiés (qui représentent plus de 40 % de la population) sont parfois pourchassés par des Mahorais qui, jugeant la police trop laxiste, procèdent eux-mêmes à des expulsions musclées (les « décasages »).

(illustration : Chacri)

Aux Comores, on n’a pas oublié le bon mot d’Emmanuel Macron en 2016. En visite au centre de sauvetage d’Étel, en Bretagne, Macron a voulu montrer qu’il sait bien qu’un kwassa-kwassa n’est pas un bateau de pêche : « le kwassa-kwassa pêche peu, il amène DU Comorien, c’est différent. »


Des esprits chagrins se sont offusqués et ont même vu là une expression flagrante de racisme social, avec toute la morgue de l’énarque. Surtout l’expression « DU » Comorien, comme si c’était une chose ou un quelconque produit. Le terme a une résonance profonde dans ces Comores longtemps spécialisées dans le trafic d’esclaves vers le Moyen-Orient. Aujourd’hui encore, à Mayotte, l’exploitation féroce DU Comorien clandestin est assimilée à de l’esclavage moderne.

Ce pourrissement est le résultat de la politique post-coloniale de la France, que représente avec zèle le très viril ministre de l’Intérieur Gérald Moussa Darmanin.

Mais « l’attractivité sociale » qu’il dénonce, est-elle si attractive ? Voici quelques chiffres fournis par l’INSEE suite au recensement effectué à Mayotte en 2017 :
 77 % population survit sous le seuil de pauvreté (pour 14 % en France métropolitaine.)
 38 % de la population vit dans des cases en tôle
 30 % des ménages n’ont pas l’eau courante
 35 % des 15 à 64 ans sont au chômage
 la moitié de la population a moins de 17 ans
 le produit intérieur brut de Mayotte est 8,5 fois plus important que celui des Comores
 « le niveau de délinquance est bien plus élevé à Mayotte qu’en France métropolitaine et que dans les autres départements et régions d’Outre-mer (Drom) [1] ».

(illustration : Chacri)

Ils fuient les Comores, la misère et même la faim. Ils ont longtemps économisé les 400 euros qu’exige le passeur. En mer, ils sont pourchassés et aussi parfois sauvés par les vedettes de la police de l’air et des frontières. La chasse au clandestin est l’activité principale à Mayotte, 20 000 reconduites à la frontière par an, plus que toute la métropole, une véritable industrie.

Mieux vaut risquer de mourir noyé que d’être sûr de mourir de faim. Ils sont quarante, hommes, femmes, enfants, entassés dans un kwassa-kwassa, une barque de sept mètres de long, en route pour Mayotte, qu’on aperçoit la nuit à 70 km, la terre promise.

Daniel Mermet

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  • Submersion migratoire Abonnés

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    Rhinocéros, orangs-outans, léopards et pangolins sont en voie de disparition, de même que les abeilles, les insectes et des milliers de plantes. Constat alarmant mais on oublie une espèce menacée : le Français !

    Oui, tout comme l’outarde barbue, le pluvier guignard et le traquet rieur, la Française et le Français sont en voie de disparition. Nous sommes menacés de « submersion migratoire ». Le premier ministre François Bayrou a tiré le signal d’alarme, la France est menacée de submersion migratoire. Il a bien insisté : « quiconque s’est confronté à la situation à Mayotte – et ça n’est pas le seul endroit de France – mesure que le mot de "submersion" est celui qui est le plus adapté » (Assemblée nationale, 28 janvier 2025). Oui, il insiste bien : « ça n’est pas le seul endroit de France ». Le premier ministre « centriste » d’un gouvernement français reprend et renforce le thème fondamental de l’extrême droite.

  • Chaque mardi, Olivier Besancenot raconte les chansons de notre histoire Eugène Pottier : « Jean Misère » Abonnés

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    Quel est le point commun entre l’auteur de L’Internationale, l’artiste Marcel Mouloudji et la chanteuse Agnès Bihl ? Réponse : un homme nommé Jean Misère. Jean était un ancien communard, qui échappa à la répression menée par les Versaillais et finit sa vie dans la solitude et le dénuement le plus total, d’où son surnom, Jean « Misère ». Un surnom trouvé par le poète Eugène Pottier, car en fait Jean Misère n’a pas réellement existé.

  • Gérard Mordillat : « il n’y a pas d’alternative, il faut censurer le gouvernement » Abonnés

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    Alors, censureront ou censureront pas ? Le sort du gouvernement Bayrou est suspendu aux tergiversations des socialistes et du Rassemblement national qui laissent planer le doute sur leurs intentions. En attendant de voir si François Bayrou passera la fin de l’hiver à l’hôtel Matignon ou à la mairie de Pau, Gérard Mordillat n’a aucun doute, lui : « il n’y a pas d’alternative, il faut censurer le gouvernement ».

  • Olive vous souhaite une bonne année en chanson Ballade pour l’an nouvel Abonnés

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    Ça y est, c’est la nouvelle année
    Je veux que ma chronique chante
    L’alexandrin ? J’ai déjà fait
    L’octosyllabe ?… Allez, je tente !

    Pour écrire en octosyllabe
    On se plie, on prend pas la fuite,
    Y’a une règle indépassable :
    Le nombre de pieds sera huit.

    Or, deux fois quatre (ni plus ni moins),
    C’est très court si on veut tout dire
    Pour que la rime ne choit point,
    Il faut que le propos déchire.

  • Laurence De Cock reçoit la députée communiste des Hauts-de-Seine Elsa Faucillon : « pendant l’examen du budget, le RN est venu plusieurs fois au secours des macronistes » Accès libre

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    Tout le monde n’a pas eu la chance d’avoir des parents communistes. Elsa Faucillon, si. Marie-Pierre et Jean-Marie sont communistes et même syndicalistes à la CGT. C’est sur leurs genoux qu’Elsa Faucillon a chanté sa première Internationale. C’est sur leurs épaules qu’elle a fait sa première manif. C’est dans leurs bras qu’elle a visité son premier piquet de grève. Elle doit son prénom non pas à La Reine des neiges mais aux poèmes d’Aragon pour Elsa Triolet. Elle a toujours vécu, depuis qu’elle est née, dans des municipalités communistes. Il est donc guère surprenant qu’Elsa Faucillon soit devenue depuis 2017 députée communiste de Colombes, Gennevilliers et Villeneuve-la-Garenne. Georges Ibrahim Abdallah, le système carcéral, les migrants, le renouvellement du PCF : Elsa Faucillon raconte tous ses combats à Laurence De Cock dans ce nouvel épisode du podcast « Si j’aurais su ».

  • Chaque mardi, Olivier Besancenot raconte les chansons de notre histoire Ana Tijoux : « Antipatriarca » Abonnés

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    Il y a dix ans, en 2014, la chanteuse franco-chilienne Ana Tijoux sortait son album Vengo. Parmi les dix-sept titres présents sur le disque, il y en a un qui a connu un grand succès en Amérique latine, c’est « Antipatriarca ». Une chanson qui résonne comme un manifeste de ce qu’on peut appeler la « troisième vague » féministe, après une première vague qui a lutté pour obtenir le droit de vote au début du XXe siècle et une deuxième vague qui s’est levée dans les années 1960 contre le système patriarcal. Olivier Besancenot revient aujourd’hui sur les combats et la musique d’Ana Tijoux.

  • UN SEUL DANS LA FOULE Des nazis ? Où ça, des nazis ? Abonnés

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    On ne peut plus rien dire, on vous traite de nazi ! Regardez cette photo : des gens qui saluent, qui remercient et qui vous envoient leur cœur. Aussitôt les wokistes crient au nazisme ! Voyez sur cette image : ils ont même entouré le seul qui ne salue pas, comme par hasard, un seul dans la foule ! Mais qui est ce type qui ne salue pas ?

    On va le découvrir. Mais d’abord il faut revenir au 9 janvier dernier, marqué par cette rencontre historique entre Elon MUSK et Alice WEIDEL, leader de l’AFD (Alternative für Deutschland), parti d’extrême droite proche des mouvements néo-nazis allemands. L’AFD est crédité de 20 % d’intentions de vote pour les législatives du 23 février et Elon MUSK, qui possède une importante usine TESLA à Berlin, est venu lui apporter son soutien avec ce message diffusé sur toute la planète : « only the AfD can save Germany » (« seul l’AfD peut sauver l’Allemagne »).

  • « Déportation de masse maintenant » Une dame avec une pancarte Abonnés

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    Dans un flot d’images, un torrent, un gavage d’images, voilà une seule photo dans un meeting de Trump, une dame avec cette pancarte : « MASS DEPORTATION NOW ».

    Elle est tout heureuse, toute ravie, le genre de mamie qui sait choisir les airelles pour la dinde de Thanksgiving, qui s’occupe de l’entraide dans son église, quelque part en Alabama et qui adore gâter ses petits-enfants.

    Comment en est-elle arrivée à arborer cette pancarte ? Comment en est-elle arrivée à exiger une déportation de masse, là, maintenant avec ce grand sourire ? Dix à treize millions d’hommes, femmes, enfants doivent être « déportés », elle l’exige.

    Elle applaudit quand Trump, pour la millième fois, dit qu’il vient sauver ce pays envahi par « des criminels dangereux, dont beaucoup proviennent de prisons et d’institutions psychiatriques et qui sont entrés illégalement dans notre pays depuis le monde entier ».

  • Contre angoisse et résignation, un entretien avec Alain DENEAULT qui publie FAIRE QUE ! (Lux) PODCAST FAIRE QUE ! Une réponse à la question « que faire ? » : FAIRE QUE ! Accès libre

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    QUE FAIRE ? C’est la question mille fois posée face à toutes les turbulences comme devant les grands horizons. Comment s’orienter dans des bouleversements écologiques sans précédent, auxquels, manifestement, ni les États ni le capital ne remédieront ? Comment s’engager quand l’extrême droite sème la confusion et détourne la colère des objets réels ? Comment s’y prendre quand le libéralisme dissout tous nos repères dans la gouvernance technocratique ? Comment agir quand on est passé de Lénine à Calimero, du souffle révolutionnaire à la complainte victimaire ?

Une sélection :

La lettre hebdo de Daniel Mermet La résistance d’un prof israélien accusé de trahison Accès libreLire

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On tue Nasrallah, on oublie Gaza, on danse à Tel Aviv, Nétanyahou exulte, BHL est de retour. Joe Biden pleure les enfants morts et fait l’indigné tout en livrant ses bombes à Bibi. Bonne nouvelle aussi pour le RN et Marine Le Pen, ses amis d’extrême droite remportent les législatives en Autriche. Le FPÖ (Parti de la liberté d’Autriche ) – qui soutient Israël – est un parti franchement nazi. Son leader Herbert Kickl veut devenir le VOLKSKANZLER, le « chancelier du peuple », titre emprunté à un autre autrichien, Adolf Hitler.

Hommage à Catherine Ribeiro (1941-2024) Catherine Ribeiro en concert aux Bouffes du Nord Accès libreVoir

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En 1995, la chanteuse Catherine Ribeiro créait au théâtre des Bouffes du Nord le spectacle « Vivre libre ». Elle y chantait ses propres chansons mais aussi celles d’Aragon, de Barbara, Brel, Ferrat, Ferré, Lluís Llach, Colette Magny, Gérard Manset, Danielle Messia, Anne Sylvestre et même, si vous allez jusqu’à la fin, une surprise à réécouter alors que nous célébrons le 80e anniversaire de la libération de Paris. En hommage, nous vous proposons de découvrir ce concert :

L’historien Gérard Noiriel publie PRÉFÉRENCE NATIONALE (Gallimard,3.90Euros) (Vidéo et podcast | durée : 51’23) Préférence nationale : cette vieille recette facho, un sujet urgent AbonnésVoir

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« Il y a toujours un groupe qui symbolise le rejet en fonction de la conjoncture du moment », dit l’historien Gérard Noiriel. Il est urgent de démonter le système de cet apartheid dont les électeurs du RN sont souvent eux-mêmes les premières victimes.