« Traînée, pouffiasse, paillasse à boches ! » À la Libération, plus de 20 000 femmes accusées sans preuve de « collaboration horizontale » furent tondues en public un peu partout en France. Les exécutants, juges et bourreaux, étaient bien souvent des combattants de la vingt-cinquième heure, des faux résistants d’une rare veulerie.
Des chercheurs ont vu dans ces scènes un moyen pour les hommes de réaffirmer leur autorité et leur virilité après des années de défaite et d’humiliation. Comme si, pour retrouver l’estime de soi, il fallait humilier quelqu’un d’autre, quelqu’un de plus vulnérable, le plus souvent. C’est la mécanique du racisme, et c’est la mécanique du lynchage, avec la même joie abjecte de la populace que montre les nombreuses photos faites pour célébrer ce « carnaval moche », comme l’appelle Alain Brossat.
Longtemps, l’opinion générale ne trouvait là rien à redire. Il s’agissait d’une forme d’épuration et voilà tout. En 1964, l’hommage de Brassens à la TONDUE fit scandale. Il n’avait pas osé s’interposer, il avait juste ramassé une mèche de cheveux qu’il avait mise à sa boutonnière. Brassens était fier de n’avoir mérité aucune décoration mais, chantait-il, « j’ai ma rosette à moi : c’est un accroche-cœur ».
La plupart de ces femmes ont caché toute leur vie cette torture morale et physique. Beaucoup sont aujourd’hui disparues, la plupart sans en avoir parlé. En 2002, nous avions rencontré MANDOLINE, qui avait voulu pour la première fois à 81 ans raconter son histoire.
Une émission diffusée la première fois le 7 janvier 2002 sur France Inter.
Programmation musicale :
– Zarah Leander : Sag’ mir nicht Adieu
– Georges Brassens : La Tondue