RENCONTRE AVEC IDITH ZERTAL

TEL-AVIV GAZA, match nul

Le , par Daniel Mermet

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Une équipe de chaque côté, un arbitre au milieu, le public autour et la balle au centre. Vous connaissez. Sauf que là, on voit que l’une des équipes n’a pas de chaussure, que les joueurs ont des maillots en loque, des pansements, des béquilles et des bras cassés. De l’autre côté, par contre, ils sont suréquipés, bottés, robotisés, informatisés, sur-armés avec des chars, des hélicos, des drones. Un énorme rouleau compresseur face à un moucheron récalcitrant. Et pourtant l’arbitre fait comme si de rien n’était, comme si il y avait deux camps équivalents, de même force et de même niveau.
Grotesque ? C’est pourtant exactement ce que font la plupart des médias avec « le conflit israélo-palestinien » Depuis tant d’années deux camps face à face se disputent bêtement un territoire alors qu’ils pourraient vivre en paix comme les frères qu’ils sont en vérité. Ah, comme c’est regrettable !

On vient de le voir encore à Paris. Paris l’été se transforme en Paris Plages. On met du sable, des parasols, des chaises longues, des jets d’eau le long de la Seine. Et la ville de Paris invite une ville étrangère. Cette année c’était Tel-Aviv. Tel-Aviv sur Seine. Les supporters de Tel-Aviv étaient contents. Les supporters de l’autre camp n’étaient pas contents. Ils sont venus manifester au nom de Gaza. Gaza contre Tel-Aviv. Séparés par un épais mur de flics devant des touristes hébétés . Cinq cents policiers et gendarmes étaient mobilisés et presque autant de journalistes. « Une métaphore du conflit israélo-palestinien » ont dit les médias. « Êtes-vous pour, êtes-vous contre ? » ont demandé les médias. Car un vrai journaliste ne prend pas parti, il incarne l’objectivité et le juste milieu. Plus vous vous écartez du juste milieu plus vous êtes extrémiste. Ce qui n’est pas bien car les extrêmes se rejoignent. Le vrai journaliste renvoie les deux camps dos à dos ou face à face et passe a autre chose. Le match nul Gaza - Tel-Aviv a rappelé toute la violence cachée sous la fausse objectivité médiatique.

Bombardement de l’armée israélienne sur Gaza en Juillet 2014

En vrai, entre Tel-Aviv à Gaza c’est quelques dizaines de kilomètres. À Gaza 1.800.000 habitants vivent dans une seule cage. Il y a un an, en toute impunité, l’armée israélienne a massacré plus de 2.200 personnes, essentiellement des civils, dont 550 enfants. Les dégâts sont énormes, la station électrique, et la station d’épuration ont été détruites. On manque de tout, à peine quelques heures d’électricité par jour, presque plus d’eau potable.Tout vous pousse à la violence ou à la fuite ou à l’abattement. C’est fait pour.

Selon un rapport de l’Assemblée nationale, 90% de l’eau extraite de l’aquifère à Gaza est impropre à la consommation. Les territoires palestiniens ne disposent aujourd’hui que de 18% des ressources aquifères et n’ont aucun accès aux eaux de surfaces, ce qui leur confèrent 10% de l’eau disponible contre 90% pour les Israéliens.

Ces chiffres sont connus. Enquêtes et infos sur toutes les formes d’oppressions brutales ou rampantes infligées aux palestiniens, sont en grande partie accessibles.

Les Palestiniens sont très loin de contrôler leur territoire. «  Israël exerce un contrôle quasi total sur les territoires, l’espace aérien et les eaux territoriales, les zones tampons à l’intérieur de la bande de Gaza, les entrées et sorties - des personnes comme des marchandises - du territoire et les registres d’état civil  », selon l’ONG Breaking the Silence

Il faut rappeler l’énorme puissance militaire d’Israël. Le budget de la défense israélien est le cinquième plus important au monde par pourcentage de PIB (6,5%) et le troisième par habitant (1.882 $/hab), selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI).

Tirs de roquettes lancés de la bande de Gaza vers Israël en juillet 2014 (Photo : AFP / Menahem Kahana)

Les dépenses militaires tournent autour de 15 milliards de dollars annuels ces dix dernières années, dont une aide militaire américaine de 3 milliards (3,4 milliards de dollars en 2014) à quoi s’ajoute l’aide destinée à financer le bouclier antimissile Iron Dome, ce qui « garantit à l’État hébreu un "avantage qualitatif" sur tous les autres pays de la région », selon le GRIP (Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité). Il faut rappeler aussi qu’Israël est un des plus puissants marchand d’arme du monde.

Aucune nouveauté dans ces informations. Elles sont connues par les médias et aisément accessibles. Alors pourquoi tant de pudeurs et de ménagements pour informer sur le rapport de force entre Tel-Aviv et Gaza ? La réponse est simple et chaque journaliste la connaît. C’est la trouille du chantage à l’antisémitisme. Une grosse ficelle, mais qui marche toujours et qui terrorise toujours dans les rédactions sans qu’il soit même nécessaire d’en parler.

Le reptile de l’antisémitisme rampe toujours et doit faire l’objet de toute les vigilances. Mais c’est aussi une arme très utilisée et très efficace par dissuader et discréditer toutes critiques de la politique israélienne. Mille fois cette stratégie indigne a été dénoncée et démasquée. Indigne, car elle banalise l’antisémitisme. Mais elle revient encore et encore. Et elle gagne et elle fait taire.

Voilà ce qui explique le malaise et presque la nausée en rentrant à Paris en ce pourtant joli mois d’août.

Daniel Mermet

À (ré)écouter, un entretien avec la grande historienne israélienne Idith ZERTAL auteur du livre Les Seigneurs de la terre, une histoire de la colonisation israélienne des territoires occupés. Depuis 1967, en violation du droit et des lois, la colonisation rend la paix impossible et constitue la source empoisonnée de nombreux conflits, de violences et de souffrances à travers le monde.

Les seigneurs de la terre (11/12/2013)
Là-bas si j’y suis

Programmation musicale :
 MAP : "Palestine"

Une émission diffusée pour la première fois dans Là-bas si j’y suis le 11 décembre 2013.


Entretien : Daniel MERMET
Réalisation : Franck HADERER et Guillaume GIRAUD

Voir aussi

À lire :
 Les Seigneurs de la Terre, d’Idith Zertal et Akiva Eldar, Éditions du Seuil, 2013
 Palestine, Joe Sacco, 1996

À voir :
The Gatekeepers, un documentaire de Dror Moreh (Les Films du Poisson, 2012, 95 min)

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    C’est la guerre que mène Israël. C’est ce qu’affirme le général Yoav Gallant, l’ex-ministre israélien de la défense qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité par la cour pénale internationale depuis le 21 novembre. Il n’est pas seul, le premier ministre Benyamin Nétanyahou et le leader du Hamas Mohammed Deif sont également poursuivis, tous les trois portant le même chapeau avec écrit en gros « criminel de guerre ».

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    Dans la nuit du 7 au 8 novembre à Amsterdam, après un match de foot entre l’Ajax et le Maccabi Tel Aviv, des juifs ont été pris pour cibles en plein cœur de l’Europe. Indignation, émotion, condamnation. Mais que s’est-il vraiment passé ? Poser la question vous rend suspect.

    C’est évident, c’est un pogrom. Le mot va être repris partout. Récupération, instrumentalisation, surenchère délirante. Il faudra plusieurs jours pour qu’un peu d’information et qu’un peu de réflexion parviennent à montrer un peu de vérité. Trop tard bien sûr, on connaît : le mensonge monte par l’ascenseur, la vérité prend l’escalier.

    C’est le leader d’extrême droite Geert Wilders qui a dégainé le premier en lâchant à chaud le mot POGROM. C’est, huit jours plus tard, Femke Halsema, la maire d’Amsterdam, qui regrette publiquement d’avoir utilisé ce mot-là et qui dénonce l’opération de « propagande » de la part du gouvernement Nétanyahou.

    Et ça, Dillah, ça l’étonne.

  • Mandat d’arrêt contre Benyamin Nétanyahou, Yoav Gallant et le chef du Hamas pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité DREYFUS, C’EST MOI ! Nétanyahou encore victime d’antisémitisme… Accès libre

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    La Cour pénale internationale (CPI) a émis ce 21 novembre 2024 un mandat d’arrêt contre le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité ainsi que contre l’ex-ministre de la défense Yoav Gallant et le chef de la branche armée du Hamas, Mohammed Deïf.

  • On a trouvé le contraire exact de Donald Trump ! Lucie Castets, pas seulement le tube de l’été ? Accès libre

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    Comme par magie, elle est sortie du chapeau de la gauche le 23 juillet 2024. La voix des dieux de gauche est sortie des nuages : « petite Lucie, tu vas faire première ministre ! ». « Quoi ? Moi ? Qui n’ai aucun mandat, qui ne demande rien, qui ne connais guère la jungle politicienne ? »

    La voilà poussée en pleine lumière et, miracle incroyable, toutes les gauches sont d’accord pour l’installer à Matignon. Après Léon Blum et François Mitterrand, la gauche unie s’appelle Lucie Castets. On l’acclame, on lui joue Lucy in the Sky, oui mais c’est qui ? Énarque, économiste, militante des services publics, ouverte au compromis et toutes gauches compatible. Dans les rédactions, on est partagé, doit-on écrire haut fonctionnaire ou haute fonctionnaire ? Vite fait la voilà médiatisée, la voilà peopolisée, la voilà dézinguée : Lucie et son rouge à lèvres, ce sera juste le tube de l’été, et basta. Matignon, c’était pour de rire, pour le carrosse c’est retour citrouille. Oui mais dans Castets, il y a castagne, la gauche ne l’a pas lâchée et pour la suite elle est très décidée. Mais décidée à quoi ? Dialogue avec Laurence De Cock.

  • Chaque mardi, Olivier Besancenot raconte les chansons de notre histoire Mahmoud Darwich : « Sur cette terre » Accès libre

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    Il est bien sûr l’un des plus grands poètes palestiniens, mais aussi sans doute le poète de langue arabe le plus lu dans le monde, dont la renommée est toujours internationale, quinze ans après sa disparition.

    Riche de dizaines de publications en vers mais aussi en prose, son œuvre a été traduite dans le monde entier. C’est l’ancien ambassadeur de la Palestine auprès de l’UNESCO, Elias Sanbar, qui l’a traduit en français. Si on ne mesure pas forcément en France toute l’importance de Mahmoud Darwich, c’est que les Français n’accordent plus à la poésie la place qu’elle occupe toujours dans le monde arabe, et singulièrement Pour les Palestiniens. Comme l’explique Elias Sanbar, « dans la culture palestinienne, dans la mesure où c’est un peuple qui est privé de ses lieux, il peut habiter le poème. C’est pour cela que par exemple quand l’exil commence en 1948, les gens transportent avec eux des poèmes, et pas des romans ».

Une sélection :

La lettre hebdo de Daniel Mermet La résistance d’un prof israélien accusé de trahison Accès libreLire

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On tue Nasrallah, on oublie Gaza, on danse à Tel Aviv, Nétanyahou exulte, BHL est de retour. Joe Biden pleure les enfants morts et fait l’indigné tout en livrant ses bombes à Bibi. Bonne nouvelle aussi pour le RN et Marine Le Pen, ses amis d’extrême droite remportent les législatives en Autriche. Le FPÖ (Parti de la liberté d’Autriche ) – qui soutient Israël – est un parti franchement nazi. Son leader Herbert Kickl veut devenir le VOLKSKANZLER, le « chancelier du peuple », titre emprunté à un autre autrichien, Adolf Hitler.

Hommage à Catherine Ribeiro (1941-2024) Catherine Ribeiro en concert aux Bouffes du Nord Accès libreVoir

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En 1995, la chanteuse Catherine Ribeiro créait au théâtre des Bouffes du Nord le spectacle « Vivre libre ». Elle y chantait ses propres chansons mais aussi celles d’Aragon, de Barbara, Brel, Ferrat, Ferré, Lluís Llach, Colette Magny, Gérard Manset, Danielle Messia, Anne Sylvestre et même, si vous allez jusqu’à la fin, une surprise à réécouter alors que nous célébrons le 80e anniversaire de la libération de Paris. En hommage, nous vous proposons de découvrir ce concert :

L’historien Gérard Noiriel publie PRÉFÉRENCE NATIONALE (Gallimard,3.90Euros) (Vidéo et podcast | durée : 51’23) Préférence nationale : cette vieille recette facho, un sujet urgent AbonnésVoir

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« Il y a toujours un groupe qui symbolise le rejet en fonction de la conjoncture du moment », dit l’historien Gérard Noiriel. Il est urgent de démonter le système de cet apartheid dont les électeurs du RN sont souvent eux-mêmes les premières victimes.