Il a connu l’époque des militants et même celle des guérilleros en Amérique latine, il a traversé celle des notables socialistes français entrés à l’Élysée dans les années 1980, il vit désormais au temps des start-upers parvenus sous les lambris. 2017, une année sans doute charnière, peut-être même terminale pour une certaine idée de la France. Un basculement que nous avons eu envie d’analyser en compagnie de Régis Debray. Au sujet du tournant que nous vivons, mais pas seulement, l’intellectuel publie en effet un petit texte, Le Nouveau pouvoir (éditions du Cerf), mélange de réflexions sur le macronisme, l’outil Internet et l’émergence du « nouvel axe de civilisation » auquel on assiste, sous couvert d’arrivée d’une nouvelle génération aux commandes.
« Derrière l’apothéose du manager, nous trouvons l’individualisme protestant auto-entrepreneur de son salut », croit deviner Debray. Tout système de pouvoir s’appuie sur un certain système de communication, affirme aussi le « médiologue », dont on peut lire les analyses chaque trimestre dans la revue Médium (Gallimard). Le moment Macron, c’est le triomphe de l’univers mental numérique, l’effondrement du parti au profit du réseau, la ringardisation de l’État, et bien d’autres phénomènes face auxquelles la réaction politique tarde à s’organiser. Entre la vulgarité américaine de la photo officielle présidentielle, et le passage furtif du candidat Macron à la basilique Saint-Denis avant son élection, une édition de la « Guerre des Idées » pour mieux cerner la nature du moment que nous vivons.