Le plus cinglé des dictateurs n’a jamais osé rêver de voir tout un peuple se bâillonner lui-même, s’isoler des autres, chacun derrière son écran, chacun dans sa trouille. C’est pourtant ce que nous vivons. Et même si elle sait cacher sa joie, c’est une merveilleuse aubaine pour l’oligarchie. La Covid accélère le développement du capitalisme numérique. Si certains secteurs battent de l’aile, peu importe, on change de cheval. That’s life, que voulez-vous.
Et face à tout ça, que se passe-t-il ? Où en est le « monde d’après » ? Où en est cette indispensable « bifurcation » ? En mars, nous avions parlé avec notre amie la sociologue Monique Pinçon-Charlot. Quel constat, aujourd’hui, six mois plus tard ? Quelles actions possibles ? Pour Monique, la solution, c’est de faire comme les riches. Avec Michel Pinçon, elle les étudie depuis quarante ans. Seuls les riches sont solidaires et organisés en classe. Nous devons nous poser des questions du côté de ce qu’elle nomme le « marché de la contestation », qui se limite à une critique sociétale et morale. Nous devons changer, « je ne veux plus participer à l’agenda néolibéral de cette démocratie représentative. »
Un entretien de Daniel Mermet avec la sociologue Monique Pinçon-Charlot.