« Héros en blouse blanche ! » Emmanuel Macron se pâme devant les soignants. Pourtant, parmi ceux qui ont précarisé et détérioré la santé publique, il n’a pas démérité.
Face à la contestation qui gronde devant les milliers de fermetures de lit et les suppressions de postes, il n’a qu’un petit mot à prononcer : « dette ». La France a des dettes, cent pour cent de dettes, la France vit à crédit, c’est nos enfants qui paieront. De quoi clouer le bec aux contestataires. « La dette » : il lui suffit de dégainer ce mot comme un rayon paralysant. Comme ce 5 avril 2018, au CHU de Rouen :
Il n’est pas seul à user de cette ficelle. Francois Fillon, en mars 2017, au moment de la révélation de ses magouilles financières, est encore en campagne et rencontre des personnels soignants. Un grand moment, lorsqu’une infirmière précise : « on est deux. Deux pour 84 la nuit. » Réponse de Fillon : « vous voulez que je fasse de la dette supplémentaire ? »
La grosse ficelle, c’est que la dette d’un État n’a rien à voir avec la dette d’un ménage. Voilà juste 30 ans que le CADTM, le comité pour l’abolition des dettes illégitimes, se bat contre les remboursements et les intérêts qui maintiennent les pays pauvres dans la misère. Rappelons que 3 millions d’enfants meurent de faim chaque année dans le monde selon les Nations unies (programme alimentaire mondial).
L’argument de la dette, c’est aussi un moyen d’imposer l’austérité budgétaire, c’est-à-dire la réduction des budgets pour les services publics et la protection sociale. Et ouvrir grand la porte aux assurances privées et à la spéculation, alors qu’en vérité, face à sa dette, un pays comme la France détient un puissant patrimoine public (immobilier, infrastructures, entreprises publiques), amplement supérieur à sa dette.
La crise du COVID-19, qui met en évidence les effets de ces politiques assassines, sera-t-elle l’occasion d’un changement radical ?
Un entretien avec Éric Toussaint [RADIO : 21’50] :