La joie est immense, sincère, belle. Mais il y avait le président de la République pour la gâcher. Alors qu’il n’est manifestement pour rien dans la victoire des Bleus en Russie, le champion du monde de la com’ n’a pas perdu une seconde pour essayer de remonter sa cote de popularité, à coups de photos, selfies, stories, dabs, et en donnant des leçons aux joueurs victorieux :
« N’oubliez jamais d’où vous venez ! Et vous venez de là : devant vous ! Devant vous, il y a les clubs qui vous ont formés, des clubs de la France entière, il y a des jeunes de tous ces clubs, des éducateurs qui n’ont pas compté leur temps, des parents qui n’ont pas compté leur temps. [1] »
Mais comme l’a rappelé le député de La France Insoumise Ugo Bernalicis, c’est justement la politique d’austérité du gouvernement qui fragilise les petits clubs. Fin des contrats aidés, baisse des dotations aux collectivités locales, faiblesse des subventions : des petits clubs peinent à boucler leur budget, d’autres ferment, alors que tous existent grâce à l’engagement de ses bénévoles [2].
Si le foot français doit beaucoup à l’existence de ces clubs locaux et à la qualité de sa formation, il doit aussi beaucoup à l’exploitation des ressources africaines. Comme pour le pétrole ou les minerais, le continent africain regorge de richesses, de joueurs talentueux qui sont accaparés par les pays riches.
C’est l’« arrêt Bosman » qui a ouvert la voie au pillage des pays africains. En 1995, saisie par le joueur belge Jean-Marc Bosman, la Cour de justice des Communautés européennes met fin au protectionnisme dans le football européen. Finie la limitation du nombre de joueurs étrangers dans les championnats, la décision européenne ouvre la voie à une bulle spéculative autour de transferts internationaux, toujours plus chers et toujours plus nombreux. Ce néolibéralisme appliqué au football concentre les meilleurs joueurs dans une poignée de clubs les plus riches, au détriment de la grande majorité des autres.
En attendant leur rêve de carrière européenne, David Garcia est allé voir comment les footballeurs ivoiriens essaient de survivre, et s’organisent contre l’exploitation.
Un entretien de Jonathan Duong avec David Garcia, journaliste.
Programmation musicale :
– Gadji Celi : Attention Mimo arrive
Merci à Sophie Durand-Ngô du Monde Diplomatique.