APRÈS GAZA. Entretien avec Dominique Vidal en trois parties

APRÈS GAZA (2/3) : Quelles leçons tirer de l’opération « Gardien des murailles » ? Abonnés

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(illustration : © Chappatte dans NZZ am Sonntag, Zürich - www.chappatte.com)

Nouvelles violences à Jérusalem-Est. À nouveau, des tirs sur Gaza. La guerre va-t-elle reprendre ? Le cessez-le-feu semble en effet bien fragile. Rappelons qu’en onze jours, entre le 10 et le 21 mai, cette quatrième guerre depuis 2009 a fait 260 morts côté palestinien, 3 500 blessés, dont 40 % de femmes et d’enfants parmi les victimes. Les destructions sont énormes. 800 000 personnes sont privées d’eau. Côté israélien, on déplore 13 morts, dont un enfant. Comment en est-on arrivé à cette guerre ? Quel bilan ?

Dominique Vidal, historien et journaliste, est depuis longtemps un observateur engagé de ce conflit. Pour lui, comme pour beaucoup d’observateurs dans le monde, quelque chose a profondément changé, les Palestiniens ont redressé la tête. Pour la première fois, leurs missiles ont atteint les grandes villes d’Israël. Pour Vidal, cette guerre est une « démonstration de faiblesse israélienne ». Depuis longtemps, ce conflit a des répercussions profondes en France. Il ne concerne pas seulement les spécialistes de la géopolitique. Edgar Morin avait parlé des « métastases » dans la société française [1]. Pourtant, une fois encore, pour en parler les grands médias et le monde politique ont fait preuve de « retenue », comme on dit.

À cela il y a deux raisons. L’une, depuis longtemps, c’est le chantage à l’antisémitisme entretenu par les relais, en France, de la politique israélienne. Depuis des années, des intellectuels et des journalistes ont fait l’objet d’accusations, voire de poursuites, pour avoir critiqué la politique israélienne. La deuxième raison, plus récente mais dans la même veine, c’est l’accusation d’« islamo-gauchisme ». Or, ces chantages ne peuvent plus masquer les dégâts d’une politique israélienne entièrement contrôlée par l’extrême droite la plus raciste et les ultra-religieux les plus obscurantistes. Pour Gideon Levy, le célèbre chroniqueur du journal Haaretz, « les ultra-orthodoxes sont les réserves du mouvement néo-nazi qui se développe [2] ». Leur opposer l’islamisme du Hamas ne peut plus dissimuler l’énormité de cette guerre asymétrique et le viol permanent des droits des Palestiniens. Le rejet de cette politique progresse partout, notamment aux États-Unis, à travers le slogan « Palestinian Lives Matter », en référence au vaste mouvement de soutien aux Africains-américains, « Black Lives Matter ».

Par ailleurs, plus de 250 journalistes des plus importants médias du monde, dont une majorité de reporters américains, ont signé une lettre demandant à l’industrie de l’information de cesser d’occulter « l’occupation militaire israélienne » et « l’oppression systématique des Palestiniens » dans les médias. Les signataires accusent les médias grand public de « manquer à leur devoirs » envers leurs lecteurs et leurs téléspectateurs depuis plusieurs décennies [3].

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On ne remerciera jamais assez le cancer et Jésus.

Oui, tout d’abord, merci au cancer. Car s’il n’avait pas eu un cancer en 1985, à 34 ans, Gerhard Haderer aurait eu la vie indigente d’un « créateur » publicitaire. Or, c’est lorsqu’il fut opéré (et guéri) qu’il a tout laissé tomber et s’est tourné à fond vers le genre de dessins que vous allez (re)découvrir, si puissants, si violents qu’ils se passent de tout commentaire, à part quelques gloussements, quelques éclats de rire et pas mal de silences dans le genre grinçant.

Ensuite, merci à Jésus. Et surtout à Monseigneur Christoph Schönborn, cardinal, archevêque de Vienne. En 2002, Gerhard Haderer publiait La Vie de Jésus, un surfeur drogué à l’encens, ce qui faisait un peu scandale dans la très catholique Autriche, si bien que le cardinal archevêque, hors de lui, crut bon de donner l’ordre à l’auteur de présenter ses excuses aux chrétiens pour avoir ridiculisé le fils de Dieu. Au passage, on le voit, l’Islam n’a pas le monopole du refus des caricatures, mais celles-ci eurent beaucoup moins d’écho chez nos défenseurs de la liberté d’expression. Et bien entendu, comme toujours, la censure assura le succès de l’album, qui atteignit 100 000 exemplaires en quelques jours.

Le capitalisme est comparable à une autruche qui avale tout, absolument tout. Mais là, quand même, il y pas mal de dessins de Gerhard Haderer qui lui restent, c’est sûr, en travers de la gorge. On peut rêver et c’est déjà beaucoup.