Les veilleurs de nuit, veillent à ce que la nuit ne disparaisse pas.
L’ombre, le propice, l’imprécis, l’invisible, les rêveries, les corps en fusion sous l’empire du désir, bref, tout ce qui est menacé par la raison, par la gestion, par l’avidité, tout ce qui entend abolir la folie au nom de l’ordre des choses.
Voilà sur quoi veillent les veilleurs de nuit.
Mais ils veillent aussi à l’apparition des lueurs.
Ils guettent la moindre lumière au bout du tunnel, la moindre bougie, la moindre étincelle dans le noir.
"Veilleur, où en est la nuit ?" demandait jadis le dormeur à celui qui veillait sur la ville quand il passait devant la lune.
Guetteur, dis moi ce qui vient, j’entends des clameurs, dis moi si c’est le vent, j’entends des pleurs, dis moi si c’est un chien, j’entends la mort, dis moi si c’est ici, ces pas dans l’escalier, dis moi veilleur, dis moi avant qu’elle n’arrive si le monde va changer, dis moi veilleur !
Daniel Mermet, le 15 février 2015