Comment mener une guerre révolutionnaire ? Faut-il d’abord gagner la guerre contre l’ennemi réactionnaire avant de pouvoir penser prendre des mesures révolutionnaires ? Ou bien faut-il mener les deux de front, la guerre contre les forces anti-révolutionnaires et la révolution sociale en même temps ?
Cette question toute théorique a trouvé une incarnation très pratique et très concrète dans un épisode de l’histoire du XXe siècle, en 1936 et 1937, pendant la guerre civile espagnole. Le camp républicain, censé faire front contre la tentative de coup d’État des nationalistes menés par Franco, se divisa sur des questions politiques et stratégiques : d’un côté le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et le Parti socialiste unifié de Catalogne (PSUC), membre de l’Internationale communiste, qui réprimèrent les anti-staliniens du Parti ouvrier d’unification marxiste (POUM) et de la Fédération anarchiste ibérique (FAI). Le point d’orgue de cet affrontement fut les Journées de mai 1937 à Barcelone, dont les combats firent plusieurs centaines de morts au sein des différents mouvements anti-fascistes.
Le premier témoin de ces guerres intestines, ce fut le journaliste et écrivain britannique George Orwell, qui prit les armes contre les nationalistes. Engagé sur le front au sein d’une milice du POUM, il sera blessé d’une balle dans la gorge. Spectateur désabusé de la répression menée par le parti communiste contre ses anciens alliés qualifiés d’« hitléro-trotskistes », Orwell garda une aversion contre le stalinisme, et contre la falsification de la vérité dont se sont rendus coupables les soutiens aveugles du parti communiste. Deux thèmes qui feront la matière principale de son chef-d’œuvre, Mille neuf cent quatre-vingt-quatre. Olivier Besancenot rend hommage à George Orwell (et à Ken Loach !).